Autonomie, rôle propre et prise en charge holistique : l'article 51 "Equilibres" redonne du sens au métier infirmier
Lancé en 2019 et passé en phase de pré-généralisation fin 2023, l'"article 51", désormais reconnu comme "innovation", expérimente un nouveau modèle d'intégration des soins primaires de proximité avec une rémunération des infirmières fondée sur le temps passé auprès du patient. Inspiré du modèle néerlandais "Buurtzorg", Équilibres promeut un système de prise en charge en équipe centré sur les patients, leur autonomisation et leur qualité de vie, plutôt que sur la production d'actes techniques.
Lucile Perreau
Article publié dans Concours pluripro, juin 2024
Source chiffres clés : Soignons Humain
Le contexte
Lancé dans trois régions (Hauts-de-France, Île-de-France et Occitanie), l'"article 51" Équilibres – pour Équipes d'infirmières libres, responsables et solidaires – vise à offrir un meilleur accès aux soins. "Le projet a été porté par Soignons Humain. Son président [Guillaume Alsac, NDLR] souhaitait créer un projet dans le secteur du soin alors que c'est un ingénieur polytechnicien qui ne connaissait pas du tout le milieu", se souvient Bruno Rouane, coordinateur de la MSP du Haut Vallespir et de la CPTS Vallée du Tech (Pyrénées-Orientales) et infirmier clinicien du dispositif Équilibres. "C'est en se renseignant qu'il a découvert Buurtzorg aux Pays-Bas."
Buurtzorg signifie "soins de quartier". Ce modèle néerlandais a été fondé en 2006 par Jos de Blok, infirmier "qui était soumis à l'acte et à la course et qui a souhaité changer les choses", indique Bruno Rouane. L'innovation Équilibres en est donc une adaptation. Dans la pratique, le dispositif offre une prise en charge globale des patients en totale autonomie pour l'infirmière libérale ainsi qu'une rémunération non pas à l'acte mais au temps passé auprès de ces derniers. Le modèle repose sur la mise en place d'équipes autonomes d'infirmières libérales intervenant sur une zone géographique délimitée, proche de leur domicile. Il vise à améliorer les prises en charge au domicile (y compris le maintien à domicile) et permettre un exercice du soin infirmier à domicile centré sur le patient, holistique, en équipe et coordonné, soutenu par une tarification forfaitaire au temps passé auprès des patients, dérogatoire à la nomenclature d'actes infirmiers actuellement en vigueur.
"Lors de la création de Buurtzorg, l'équipe initiale était constituée de 4 infirmières. Elles sont maintenant plus de 10 000 aux Pays-Bas. À sept reprises, ils ont été nommés 'Employeur de l'année', et aujourd'hui aucune loi de santé hollandaise n'est votée sans leur avis", révèle Dominique Jakovenko, infirmier libéral et référent Occitanie d'Équilibres. "En voyant les excellents résultats de Buurtzorg, Soignons Humain a décidé de l'adapter au système de santé français – dans le modèle néerlandais, les infirmières sont salariées et non libérales. L'association s'est donc rendue en Hollande avec le ministère et la Cnam pour leur présenter le modèle. Aujourd'hui, celui-ci est en train d'être développé dans environ 35 pays, dont le Canada, le Brésil, la Belgique..."