Loin de l’image de "gros chat mou" selon la terminologie de Paul Frappé, président du Collège de la médecine générale(1), le médecin généraliste participe pleinement aux solutions mises en place pour répondre aux défis de la médecine de ville. Comment peut-il, en lien avec les équipes de soins primaires, être acteur de l’innovation en santé ? La question, posée au 13e Congrès Médecine générale France début avril dernier, a été débattue lors d’une intervention qui s’articulait autour des expérimentations "article 51". Approche "itérative et collaborative", l’article 51 (voir encadré) est "une invitation à penser différemment en sortant du cadre, souligne Natacha Lemaire, rapporteure générale du Conseil stratégique de l’innovation en santé. Ce processus percute les organisations en place et les habitudes."
 

Après la téorie, la pratique

Directeur de la stratégie et référent "article 51" à l’ARS Île-de-France, Yannick Le Guen a insisté sur l’importance de l’accompagnement dans la réussite d’un projet : "Nous avons mis en place sur notre territoire une équipe commune ARS-Cnam, sorte de porte d’entrée unique qui permet de mieux avancer… Mais ce n’est pas si simple de déroger. Car il faut penser différemment le financement, et cela a des impacts…" En effet, repenser le financement équivaut à expérimenter une autre organisation dont celle du financement d’équipe… Une expérimentation qui secoue le "cadre réglementaire régional assez limité parfois", note Luc Duquesnel, président Les Généralistes-CSMF et cogérant d’une Sisa, qui, après deux appels à projets Ipep et Peps(2), teste en Mayenne un paiement au forfait. Une nécessité, ajoute-t-il, car "les patients ont changé".

C’est aussi l’objet de l’expérimentation en cours à l’institut Jean-François-Rey (qui regroupe dix centres de santé) : "On a répondu à un appel à projets Peps, et on en est à la première brique. Il s’agit de mettre en commun, d’ici début 2020, les salaires des infirmières et des médecins généralistes. Une rémunération d’équipe qui permettra de mieux nous organiser et d’améliorer nos pratiques", a expliqué Alain Beaupin, son président. "Les trois modèles sur lesquels se base l’article 51 sont inspirés par des expériences étrangères et des retours d’expérience des autres", souligne Natacha Lemaire. D’ailleurs, ce dispositif existe en Belgique depuis plus de vingt-cinq ans…

Si le délai d’instruction des projets peut être perçu comme "assez long", Yannick Le Guen précise que celui-ci dépend de la maturité de l’équipe. Deux pistes sont étudiées en ce sens : le partage des projets à un stade plus précoce, et un dispositif d’accélérateur, soit une journée de travail dans un lieu commun où toutes les équipes compétentes sont réunies pour travailler sur le projet. S’il est encore trop tôt pour analyser ces dispositifs, cela permettra "de gagner du temps !", s’enthousiasme Natacha Lemaire.

1. Lors de son discours d’ouverture du 13e Congrès en avril dernier, à Paris.

2. Ipep (incitation à la prise en charge partagée) et Peps (paiement en équipe des professionnels de santé).

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