La vice-présidente de la faculté de santé d’Angers estime que des changements de fond doivent se faire dans le déroulement des études de médecine.
• La typologie des étudiants recrutés doit changer. "Si le pourcentage d’étudiants issus du milieu rural est infinitésimal, on ne doit pas s’étonner de ne plus avoir de médecins de campagne. La réforme des études de santé participe à la diversification des publics qui entrent dans le système, notamment en permettant de nouvelles voies d’accès. On verra si cela fonctionne, ce n’est pas mécanique." Elle préconise d’aller "plus loin", avec des filières réservées aux élèves de ZEP. "Pour la population, c’est aussi important d’avoir des médecins qui leur ressemblent, qui ont envie d’exercer là où ils ont grandi."
• "Il faut porter une évolution pour que les étudiants aillent effectuer leurs stages dans des hôpitaux non universitaires ou en ville – cela augmente la probabilité que l’étudiant ait envie de s’installer dans la zone de stage. Et pour cela, il y a un fil à tirer, qui ne me semble pas très coûteux, qui est de diversifier les statuts d’enseignants – professeurs associés, chefs de clinique… Des expérimentations locales existent, mais il faut passer à l’échelle."
• Il faut changer l’imaginaire. "Influencés par la série télévisée “Dr House” – mais aussi par les formateurs –, les étudiants sont persuadés que le rôle du médecin est de faire un diagnostic compliqué ou de mettre en place un traitement curatif pour les maladies graves… mais la médecine, ce n’est pas que cela ! C’est plus souvent trouver des solutions pour maintenir une personne âgée pluripathologique à domicile ou renouveler des traitements. C’est, hélas, considéré comme “moins noble” alors que c’est la part de la médecine qui est en croissance. Les statistiques montrent que les étudiants souhaitent davantage s’orienter vers la chirurgie plastique, la dermatologie et les maladies infectieuses que vers la biologie, la santé publique et la gériatrie. Il y a des questions de rémunération, de pénibilité mais aussi de prestige. C’est un virage culturel qui ne peut se prendre en épingle à cheveux."
Yann Bourgueil confirme qu’il y aura forcément "des résistances aux changements" et se demande si, là où Isabelle Richard fait part de réformes majeures à l’échelon national, il ne s’agirait pas d’agir plutôt au niveau des territoires. "En effet, répond l’ancienne doyenne de la faculté d’Angers – université expérimentatrice de PluriPass et de Territoires universitaires de santé –, on peut expérimenter au niveau local en ayant des exigences moins détaillées qu’au niveau central, laisser des formations se déployer à l’échelon des universités et les évaluer a posteriori plutôt que d’avoir un cadre normatif très étroit."