En 2017, Adeline Cancel s’est lancée, avec le Dr Olivier Romieu, dans une expérimentation de consultation auprès des patients atteints de pathologies chroniques stables au sein de la MSP de Pouzolles (Hérault), dont elle est également la cofondatrice et la coordinatrice. Un avant-goût de son futur métier… Puisqu’il lui a fallu ensuite repartir un an à la faculté, afin de valider son diplôme d’infirmière en pratique avancée (IPA). « Depuis juillet 2019, nous sommes une soixantaine en France à être ainsi diplômées. Mais personne n’était prêt à ce que des IPA sortent déjà diplômées*. J’ai donc continué les consultations en mode expérimental, de façon bénévole, car le décret du modèle économique n’est sorti qu’en janvier 2020. Mais c’est comme lorsqu’on a le permis de conduire : si on ne conduit pas tout de suite, on perd les réflexes ! Et, en pratique avancée, c’est pareil ! Car ce n’est pas dans la culture infirmière de faire de la consultation. Au moins, je pratique et je travaille pour l’implantation de la fonction », témoigne-t-elle.

Les démarches pour résoudre les problèmes administratifs, en particulier auprès de la Cnam, sont chronophages et « usantes ». « C’est un parcours du combattant journalier et continuel. Si je fais un renouvellement d’ordonnance avec mon numéro de professionnel de santé d’infirmière libérale, le logiciel du pharmacien n’est pas adapté pour cela et, par conséquent, l’ordonnance ne passe pas. Du coup, soit je fais signer les ordonnances par le médecin, ce qui est complètement improductif, soit j’utilise une ordonnance du médecin en mettant mon tampon d’IPA à la place de son nom, mais ce modèle-là n’est pas encore validé par l’Assurance maladie. En pleine épidémie de Covid-19, il faut en urgence que je sois opérationnelle car les médecins me renvoient tous les patients chroniques ! »

 

Adeline Cancel
Adeline Cancel

 

Ce qui la fait tenir ? La perspective, elle l’espère, de bientôt exercer pleinement et « dans de bonnes conditions » comme IPA, une activité « d’une richesse formidable ». L’envie de travailler en exercice regroupé a toujours été présente. Elle s’est pleinement investie, dès 2016, aux côtés du Dr Olivier Romieu pour monter la MSP de Pouzolles, qui rassemble aujourd’hui 22 professionnels. Garder une dynamique collective tout au long du projet, monter une structuration juridique, mettre en place des outils communs… Un parcours compliqué que connaissent la plupart des porteurs de projets. « Nous, professionnels de santé, ne sommes pas chefs d’entreprise, experts-comptables, juristes. Or on nous demande d’être tout cela en même temps ! Par ailleurs, il est très difficile de faire vivre tout ce petit monde au même endroit ! Il y a toujours des personnalités plus virulentes quand d’autres essaient d’arrondir les angles. »

Malgré tout, Adeline Cancel est convaincue du bien-fondé de l’exercice regroupé. Depuis début mars, elle consulte également dans la MSP de Saint-Pons-de-Thomières, pour le suivi des patients atteints de pathologies (cardiologie, neurologie, pneumologie et diabète). Les consultations durent une heure. «  Nous avons des délégations médicales qui nous permettent d’être efficaces mais nous sommes aussi infirmières et la prise en charge globale du patient est notre corps de métier », explique-t-elle. Contrainte de continuer son activité d’infirmière libérale pour des raisons financières, elle souhaite « à terme » ne pouvoir se consacrer qu’à ses fonctions d’IPA et vivre de ses nouvelles compétences.

* Voir notre dossier sur les infirmières en pratique avancée, mai 2019

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